L’infirme du marché de Moulmein.

Le seul « article » que je ne peux pas illustrer car la simple vision de certaines souffrances humaines est insoutenable et la pudeur exige la retenue. Et pourtant il faut regarder. Détourner le regard, s’écarter de la vue de ce qu’est la réalité de la vie, c’est fuir cette réalité, vouloir l’ignorer, s’épargner.

Après avoir fait mes photos habituelles au marché central de Moulmein, j’ai appelé au téléphone Kassim mon chauffeur-moto qui m’aide à me déplacer dans cette ville depuis mon arrivée. En l’attendant, je vis un estropié de la vie qui avançait à moitié assis sur la place devant le marché en s’aidant de ses bras et de sa jambe valide pour se rapprocher des quelques personnes à sa portée qui pourraient lui donner un peu d’argent.

Un de ses pieds avait un trou au milieu du talon de plusieurs centimètres suffisamment grand et profond pour que je puisse le voir à une distance de vingt  mètres.

Cette image n’est pas photographique, elle est là dans une partie de la mémoire, celle qui ne s’efface pas. Celle qui nous révolte. Le spectacle d’une déchéance physique de laquelle nous sommes provisoirement épargné.

Détourner la tête ou tourner le dos c’est perdre son humanité.

The only « article » I can not illustrate because some simple vision of human suffering is unbearable and modesty requires restraint. Yet to look. Look away, to depart from the view of what the reality of life is to escape this reality, want to ignore it, to spare.

After my usual photos to the central market in Moulmein, I called the phone Kassim my driver-motorcycle that helps me move in this city since I arrived. While waiting, I saw a crippled life advancing half sitting on the square in front of the market with the help of his arms and his good leg to get closer to some people within range that could give him some money.

One of his feet was a hole in the middle of the heel of several centimeters wide and deep enough so that I could see at a distance of twenty or thirty meters.
This image is not photographic, it is in a part of the memory, which is not erased. One that revolt us. The spectacle of a physical decline which one is temporarily spared.

Turn his head or turn your back has lost his humanity.